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2nde MRC 2 Rencontre avec Ahmed Kalouaz

Par PASCAL BARKI, publié le lundi 10 mai 2021 15:20 - Mis à jour le lundi 10 mai 2021 15:21
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Exposition paysage de mémoire au CPA au mois de mars 2021

Les élèves de seconde MRC  (Métiers de la  Relation Clientèle), dans le cadre de l'exposition Paysages de mémoire, ont rencontré Ahmed Kalouaz le Vendredi 2 mars 2021.

Ils avaient lu chacun un livre de l'auteur, préparé des questions et écrit des textes à partir des lieux de mémoire .

Cette rencontre s'est faite dans le cadre du cours de  co-enseignement ( un cours avec deux professeurs) ,Mme Clara de Saint Jean intervenant pour les compétences en matières professionnelles et Mme Mellal-Baoui pour les compétences en matières générales .

Les mots d'Ahmed Kalouaz

Pripiat

    Pripiat est une cité fantôme. Personne n’y dort plus au clair de lune. C’est ce que j’avais pourtant promis à Ivanna, une nuit de printemps, accrochée aux étoiles de ses yeux. La fin avril commençait à allonger ses jours sur les arbres, les rues où mon père avait, avec d’autres, planté trois mille pieds de rose pour égayer les promenades des passants.
    Le lendemain de l’explosion de la centrale, nous avions repris le chemin de l’école, tout heureux à l’idée de nous rendre le dimanche suivant à la fête foraine. Pour l’occasion se dressait une immense roue aux nacelles jaunes, les manèges nous y attendaient. Ivanna serait près de moi, faisant mine d’avoir peur. La peur, nous ne l’avions même pas imaginée lorsque l’ordre d’évacuation de la ville est arrivé le 27 avril. Nous ne devions rien emporter, même pas un jouet, un livre, un chaton. Vous reviendrez bientôt, disaient les hommes qui nous embarquaient dans les centaines d’autocars prévus pour cet exode éphémère.
    Mais personne n’est jamais revenu, Pripiat est devenu un bric-à-brac à ciel ouvert. Le stade Avanhard une forêt, comme les places, les avenues. Les animaux ont remplacé les hommes. Un aigle à queue blanche plane sur nos souvenirs.
Une agence de tourisme spécialisée permet à d’anciens habitants de venir voir ce que leur cité est devenue. Payer pour voir des tôles rouillées, des vestiges, des murs décrépis, des vitres brisées, des racines creusant le macadam.
    Pendant ce temps, le réacteur numéro 4 garde le silence sous son sarcophage hétéroclite. Ivanna est partie comme ce printemps promis. A capella une chanson m’arrime à elle. Mettre des mots sur des bribes de mémoire.

Extrait du recueil "Sous l'écorce des ans"

Photo : Tchernobyl, Galia Ackerman, 2008-2016